Rythme premier

 

Lore M

 

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Sous la lumière crue, le roulis hurle, le petit coquillage bascule de la poitrine au papier, du papier à la poitrine. - Corps d’embrasures béantes -.
L’accouchement, retenu, dure depuis quatre heures, déplacé de drapés noirs et de cols blancs.

Peinture sur sable ou sur feuille d’écorce, bleue, ocre, rouge, significative. L’artisan, le genou sûr, rince et lave, lave et rince, la toile serrée, étreinte, corsetée, galbée dans l’eau de la rivière, fraîche. Le geste s’exécute en spirales, allongé ou immobile.

D’un bout à l’autre des silhouettes, l’équilibre repose sur l’effet de symétrie. Une même ligne s’oriente sur les poulies, les hameçons, les pagaies et les tambours. La plasticité, sans cesse renouvelée sur les ornements de proue, vient aux paumes lorsque le sel découvre les visages. Bouchées d’amour à même le pas.

Dans les écuelles mates et foncées, à l’oblique des portes de bois brut et ouvragées des greniers, à l’oblique des coulées de soleil, à l’oblique des servitudes et des seuils; la chevelure des femmes trempe. Elle a des accents de vie, rugueuse, mélodique, intense, furieuse. Piano à pouces quand le visage se penche, douloureux à force de mesure.

Le limon a des épaisseurs de courants que le poignet ne renie pas. L’eau semble être ajourée à l’esprit qui sculpte des formes pleines. La nuque ressent la brûlure de milliers de becs qui déchiquettent les chairs.
Le tam-tam temporise la chape.

Dans la moiteur, rien ne serpente. Sous les masques-moustiques les chasseurs initiés ont avalé les teintes envoûtantes. Le bois se fendille, craquement imperceptible. L’herbe ténue dissout avidement les plantes de pieds.

La voix ne respire plus.

Le bras coudé en direction de la terre entraîne le front du bout des doigts, puis l’enroulement du dos, genoux fléchis; le souffle et le paysage s’embrasent, effleurent ce modelé fœtal de caresses érubescentes, d’onguents incandescents; où les incantations, au-dessus du sol qui tremble, terminent la patine du corps.

Figures emblématiques, des visages dissimulés de masques de vivre, de masques de cuivre repoussé, de peaux d’antilopes avancent puis s’effacent en un rythme enfiévré. Visions nourries du pouls de la savane aux flancs accouplés, elles égrainent la silhouette prostrée sur les pagnes qui s’élèvent et s’accroupissent.

Peinture sur sable ou sur feuille d’écorce, franchir-la-barre-des-carnations-et-des-nuances, doigts écarquillés, livrés d’encre et de pigments.

Jaillir de soi, saillir de la gravure, sourdre en l’autre.

Sous la lumière pâle, plombée, exsangue, le roulis continue.

Imperfection d’eau.

 

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